[Livre Blanc Allyteams] L'interview de Cristina Piccin
Judokate italienne installée à Paris, Cristina participe aux tournois internationaux et accompagne maintenant les sportifs et les entreprises dans leur préparation mentale et psychologique.
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Comment avez-vous commencé à pratiquer le judo ?
Pour expliquer le choix du judo, je dois dire que j’ai toujours été hyperactive étant enfant. Pour canaliser mon énergie mes parents m’incitaient à faire beaucoup de sport et notamment de la natation. Mais à l’âge de 7 ans j’ai commencé à avoir des problèmes de dos ce qui m’a poussée à arrêter la natation. Le pédiatre ayant recommandé un sport permettant d’effectuer une grande variété de mouvement, j’ai commencé le judo et je n’ai jamais arrêté depuis !
19 ans de judo c’est une belle longévité en effet. Quels ont été les moments les plus marquants ?
Je dirais que la première étape importante a été la médaille de bronze aux championnats d’Italie cadet quand j’étais adolescente. Quelle émotion ! Une émotion sincère et pure. C’est une période de la vie où les émotions sont très fortes, intenses où rien ne vient entraver le moment présent. On s’en rend compte après, comme toujours.
Après, on réfléchit, on s’améliore certes mais on perd parfois en spontanéité et donc en plaisir. Inutile d’avoir fait de la philo pour mesurer la fracture entre spontanéité et réflexion. On voit aussi la satisfaction et la fierté de ses proches. Cela compte bien évidemment mais finalement plus par construction qu’autre chose. Un sportif doit absolument performer pour lui-même. C’est une étape de compréhension qui me paraît essentiel pour tout sportif de haut niveau. C’est ce que j’ai appris au cours de ces années. Pour revenir plus précisément à votre question, j’ai ensuite évolué en senior parmi les meilleures judokates italiennes de ma catégorie (d’abord en 57 kg, puis en 63 kg ndlr) mais j’ai surtout remporté à l’étranger une médaille d’argent en Coupe d’Europe et deux 7ème place en Coupe du Monde.
Vous avez remporté plusieurs titres internationaux et vous avez la particularité d’avoir combattu en Italie et en France.
En effet, ma carrière se partage entre l’Italie et la France. Je les considère comme mes deux pays car ma mère est française et mon père italien. J’ai d’abord combattu dans la région de Trévise jusqu’à mes 19 ans, puis je suis partie à Nice (Nice Judo) et après à Paris (ACBB judo) à la suite de ma 5ème place aux Championnats d’Italie senior. J’ai commencé ainsi un parcours en première division française en me qualifiant pendant 2 ans.
J’ai ensuite décidé de combattre à nouveau avec l’Italie à l’international en gagnant la Coupe d’Italie. J’ai déménagé pour Turin (Accademia Torino) où je suis restée deux ans. Pour des raisons d’entraînement et d’opportunité professionnelle je n’ai pas souhaité intégrer un groupe sportif militaire et j’ai finalement décidé de revenir en France, à Paris, et rejoindre mes anciens partenaires d’entraînement. Aujourd’hui, je suis licenciée à l’ESBM (Etoile Sport de Blanc Mesnil ndlr) Judo et continue à combattre pour l’Italie.
Avez-vous suivi des études pendant votre carrière sportive ?
Oui j’ai fait le choix de poursuivre des études pendant ma carrière sportive. Je suis aujourd’hui titulaire d’une Licence STAPS ES à Paris Descartes ainsi que d’un Diplôme Universitaire en Préparation mentale de l'Université de Clermont-Ferrand. Cela n’a pas toujours été facile ! Quand vous êtes absolutiste comme moi le double projet est difficile à gérer au quotidien.
Justement, comment avez-vous géré la poursuite des études et la pratique d’un sport de haut niveau ?
Cela n’a pas été si simple comme je viens de le dire mais lorsque l’on a beaucoup d’énergie et de volonté et que l’on est prêt à des efforts d’organisation tout est possible. Pour ma licence, j’ai fait en sorte de suivre le plus de cours possible (grâce à mon statut de haut niveau). Pour le DU ce fut plus simple car l’Université de Clermont-Ferrand avait mis en place une plateforme pour suivre les enseignements à distance. Les périodes de stage ou d’insertion étaient plus difficiles à gérer. Ce sont des périodes pendant lesquelles j’ai mis certains aspects de ma vie personnelle de côté pour réussir à gérer de front études et sport de haut niveau. On parle souvent de la carrière sportive et des études mais il ne faut pas oublier aussi la vie personnelle. C’est très difficile de concilier les trois pour un sportif de haut niveau. Il faut bien souvent en sacrifier un. Je ne le regrette pas de mon côté puisque ces diplômes me permettent aujourd’hui d’exercer, à côté de la pratique du judo, une activité professionnelle.
Quelle est votre activité professionnelle aujourd’hui ?
Je suis préparatrice mentale. J’accompagne des athlètes de haut niveau, des particuliers, des entreprises et je suis aussi coach sportif dans 3 salles haut de gamme parisiennes. Il m’arrive également d’être conférencière/consultante en entreprise. J’apporte, dans le cadre de ces conférences ou séminaires, une méthode issue du sport de haut niveau et j’essaie de la transposer au monde de l’entreprise au profit des cadres et managers.
Que vous apporte le judo dans votre activité professionnelle ?
Le judo m’apporte une base, un vécu et des méthodes. Du subjectif et de l’objectif donc. Tout repose sur cette relation de l’être et de l’avoir. Mon vécu me permet d’être crédible, de partager des moments de ma réalité, notamment sur la façon de faire le lien entre tout ce que j’ai intégré et ce qu’auparavant j’avais vécu.
Mais plus largement, la pratique dujudo à haut niveau m’a permis de comprendre que mon empathie était une force, que ma capacité d’écoute était à l’origine de nombreuses améliorations techniques et que l’individualisme n’était pas toujours un aspect négatif d’une personnalité mais une qualité à l’origine de la performance. Enfin, et peut-être l’essentiel, l’importance de l’intuition. Le judo est un sport de contact et donc requiert une grande sensibilité qui est à la base de toute relation humaine et donc aussi du rapport coach-coaché.
Par ailleurs, j’ai appris avec ce sport la gestion de l’énergie, de l’équilibre entre le trop et le pas assez. Le judo me permet ainsi d'être percutante et décidée lors de mes pitchs.
Comment avez-vous choisi de vous tourner vers le métier de préparatrice mentale ?
C’est une longue histoire. Lorsque j’ai commencé le judo en Italie, j’avais
de bonnes qualités physiques et techniques mais le mental était un peu mon point faible. J’étais justement dans le trop et pas du tout dans l’équilibre. Quand je suis venue en France et que j’ai commencé ma formation à Clermont-Ferrand je me suis beaucoup intéressée à la psychologie du sportet à la préparation mentale. Cela m’a permis d’identifier les causes de mes difficultés passées. Ces blocages débloqués tardivement si j’ose dire m’ont donné l’envie de transmettre à d’autres ce que j’avais enfin compris. Je crois beaucoup au fait que le bon enseignant transmet avant tout ce qu’il aurait pu ou voulu comprendre plus tôt. Dans le sport, ce gain de temps et de compréhension, est fondamental. La haute performance en dépend. Un bon coach n’est donc pas toujours une personne qui a tout réussi dans sa vie de sportif. C’est avant tout, me semble- t-il, une personne qui a compris les chemins de la performance, qui a suffisamment échoué et, en même temps, été en capacité de remise en cause pour comprendre l’universel mais aussi le singulier car chaque athlète est différent. Exercice complexe mais passionnant !
Que pensez-vous de la démarche d’Allyteams ?
C’est vraiment une excellente démarche et une aide réelle pour les sportifs de haut niveau. Nous sommes, du fait de la pratique de notre sport, de la participation aux compétitions sportives, des experts de la performance et de l’atteinte des objectifs. Mais on ne nous apprend pas à évoluer dans d’autres mondes, des mondes dans lesquels nous serons pourtant inévitablement amené à évoluer après notre après-carrière de sportif. Cette connexion entre mondes qui ne se parlent pas ou trop peu est essentielle.
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LIVRE BLANC L'EMPLOI DES SPORTIFS DE HAUT NIVEAU (lien de téléchargement)
Forte d’une communauté de plus de 2.500 sportifs ou ex-sportifs de haut niveau et de dizaines d’entreprises partenaires, Allyteams a voulu donner la parole aux acteurs du monde du sport, de l’entreprise et de la formation.
Ce livre blanc est l'occasion de donner la parole à 33 sportifs ou ex-sportifs de haut niveau ainsi qu’à des cadres d’entreprise et des directeurs de formation dont les témoignages offrent une grande variété :
- d’expériences dans différents secteurs d’activité au sein de PME ou de grandes entreprises;
- de compétences techniques et entrepreneuriales : ressources humaines, digital, finance, commercial, communication, marketing, droit, etc.;
- culturelle et internationale, notamment avec des entretiens de sportifs étrangers, mais aussi de sportifs nationaux au parcours international;
- au niveau démographique, des âges (15 à 75 ans) et des genres;
- d’expertise en matière d'accompagnement des sportifs avec l’apport de personnes expertes du sujet (notamment du côté des écoles ayant développées des programmes pour les sportifs).
Cette diversité témoigne du fait que chacun possède une partie de la solution aux problèmes de l’emploi et de l’employabilité des sportifs de haut niveau.