Il y a une vie après le sport de haut niveau
Par Marie Jay (Vice championne du monde de Super géant en 2009). Article publié le 1er septembre 2016 sur le site Huffington Post (lien).
Il y a une vie après le sport de haut niveau
Pendant plus de 15 ans, ma vie s'est déroulée tel un plan d'action que l'on instaure mécaniquement. On se lève, on mange, on s'entraîne... Et on recommence. Les compétitions, les réussites, les échecs, les joies, les peines, les blessures, les victoires. Tous ces moments sont associés à des émotions fortes. Ce sont ces émotions qui m'ont fait avancer. La décision d'arrêter le sport de haut niveau est peut-être la plus dure de ma carrière.
Cette routine mise en place est la seule manière de vivre que j'aie connu. Et changer mes habitudes a été un énorme bouleversement. Je m'y suis préparée, en faisant des études pendant ma carrière, en prenant soin de ma communication, des partenariats, mais ce n'est jamais pareil lorsque l'on saute le pas.
Le premier matin, on peut se sentir heureuse, soulagée, puis vient l'heure de se demander ce que l'on va faire de notre vie. Bien sûr j'ai traversé des moments de doutes. Une fois l'euphorie passée, arrivent des moments plus difficiles, où les questions affluent et les réponses sont peu nombreuses. Où le temps de la vie de sportif parait loin. Où le temps parait long pour se reconstruire. Car oui, c'est une reconstruction. Il faut réapprendre à vivre avec un autre rythme, avec des relations différentes, avec une vision de soi-même qui évolue.
"Avec ma retraite sportive, une page s'est tournée: je suis devenue une femme épanouie et fière de mon parcours, les yeux tournés vers ce qui m'attend dans les prochaines années."
J'ai mis en place des projets qui m'ont permis de passer à une vie "normale". Ma première décision a été de reprendre mes études. Quelle école, quel domaine, quel niveau ? Grâce à un bilan de compétences financé par la région Rhône-Alpes, j'ai réussi à affiner mes envies et à m'orienter rapidement. Étant compétitrice dans l'âme, j'ai cherché les grandes écoles et j'ai trouvé un format qui me convenait idéalement: un master en formation continue à l'ESSEC, qui me permettait de pouvoir saisir différentes opportunités professionnelles tout en me formant. Le jour où j'ai été acceptée, j'étais tellement heureuse! Une nouvelle page s'ouvrait à moi. Je suis actuellement encore en formation et j'apprends énormément.
Si avec ma retraite sportive, une page s'est tournée, je ne me suis jamais trop éloignée du monde du ski, puisque je suis consultante sur Eurosport. J'ai pu commenter des courses de ski et j'espère pouvoir le faire encore un peu car ce sont des moments privilégiés. Parallèlement à cela, étant hyperactive, j'ai eu la chance de pouvoir faire une mission de conseil pour Airbnb. J'ai découvert le monde passionnant des startups et cela m'a ouvert les yeux: j'ai adoré.
Ensuite, on m'a proposé de rentrer dans un grand groupe (Quiksilver) et j'y ai fait mes débuts depuis juin. Je découvre un autre aspect du monde professionnel et c'est un challenge de chaque instant. Il faut réapprendre tout: les rythmes, les manières de travailler, les manières d'échanger. C'est une nouvelle manière de vivre. J'ai finalement grandi et suis devenue une femme épanouie et fière de mon parcours, les yeux tournés vers ce qui m'attend dans les prochaines années tout en appréciant le moment présent.
L'athlète de haut niveau a la chance de développer des compétences uniques: l'abnégation, la volonté d'atteindre ses objectifs, l'envie d'être performant, la capacité à se relever après un échec, l'envie de bien faire tout simplement... Et grâce à tout cela, il réussira à trouver un jour la sérénité et un épanouissement dans sa nouvelle vie.